mercredi 17 décembre 2014


LE FEU ET LA PLUIE
"Le roman noir, parce que c'est la crise, se joue dans un état d'urgence. Il parle du monde maintenant. Et le monde va vite. Tant pis si nous sommes fatigués."  Jean-François Vilar
Pour ce 9e polar, j'ai décidé de travailler avec une maison d'édition régionale, gérée par une équipe jeune.

Des paysages voilés d'humidité des îles britanniques aux corniches du Mourillon et du Faron, une série de meurtres ou d'agressions. Y a-t-il un lien entre ces faits divers violents ?

Mon nouveau polar pour 2015. Une autre enquête de Leonetti.

Cette fois, le Var est le théâtre involontaire d'épisodes meurtriers commencés ailleurs.

Des épisodes qui viennent se mêler aux affaires locales, prenant un malin plaisir à brouiller les pistes.

Et comme un leit-motiv, la chanson de James Taylor :

I've seen fire and I’ve seen rain
I've seen sunny days that I thought would never end
I've seen lonely times when I could not  find a friend
But I always thought that I’d see you again






"Les lumières et l’eau. Le feu et la pluie. Pourquoi cette association obsédante ? Le souvenir confus d’un rêve récurrent ? Ou une vague métaphore des journées qu’il venait de vivre ?

Ces meurtres et le châtiment infligé par d’autres meurtriers, comme la patte et la dent inexorables du destin, fauve brutal et impitoyable des vieilles tragédies.

Le Bien et le mal.



Il lui revenait, maintenant, de manière lancinante, la conversation avec le jeune gars de Siblas[1].
Le Bien et le Mal. Le feu et la pluie, le feu qui détruit et efface les traces du forfait, la pluie qui arrête le feu. Ou la flamme qui éclaire et purifie et l’eau où l’on noie , où l’on fait disparaître les corps et les preuves.
Où est le Bien ? Où est le Mal ?

Partout et en toutes choses, dans chacun de nos actes."





Voir Sudarenes Editions

http://www.sudarenes.com/ecrivains_som.htm

ISBN : 978-2-918413-76-9   Prix : 18 €
A commander sur le site de SUDARENES ou à U Culture sur 
HyperU de Saint-Maximin, à Charlemagne et aux Espaces Culturels Leclerc du Luc et de Cogolin.


[1] « Out of the blue »  « I’m a Child »

lundi 28 juillet 2014

LE GROUPE



En moins de six mois, les premiers retours sur mon 9e polar. Surtout de la part de nouveaux lecteurs. Ce roman est bien reçu comme l'avait été « Soleil de nuit ».
Pour ceux qui me retrouvent, à l'occasion des salons de l'été, l'attention se porte toujours sur l'intrigue, les personnages, la diversité du décor, mais ils apprécient aussi le retour du commandant Leonetti. Ils ont là ce personnage récurrent qu'ils me réclamaient depuis longtemps. Un lien est ainsi établi avec, un peu, « Le livre perdu », mais, surtout « L’aube dorée «  et « Out of the blue ».
Mais ce qui me paraît le plus important, c’est qu’ils comprennent mes choix, c'est à dire, en fait, ma conception du polar.
  Chaque auteur de récit policier, de thriller, écrit pour un lectorat déterminé. Ce lectorat peut rejoindre celui d’un autre auteur. Mais, le plus souvent, c’est parce que les perceptions du polar sont voisines.
  Les lecteurs qui hésitent à acquérir mes livres, le font parce qu’ils ont l’impression que les « voyages » que je propose à travers le récit ne sont là que pour masquer le caractère superficiel de l’intrigue. Je les invite, alors, à découvrir un roman plus ancien, de manière à ce qu'ils voient que l'arrière-plan occupe une fonction non anodine et joue un rôle spécifique dans la construction du roman. Tout comme les références musicales, dont j'ai exposé ailleurs la fonction métaphorique.
Les lecteurs fidèles ont, maintenant, compris ma démarche. Les nouveaux, s'ils "accrochent" au style, à ma façon de raconter une histoire, le feront ensuite, naturellement.
Cela commence déjà.
    Car démarche, il y a. Faire passer le lecteur du Var et du Lubéron à une île grecque, en bifurquant par l’Europe centrale, comme de l'emmener en Norvège jusqu’au Cap Nord, ce n’est pas confondre le récit avec un dépliant touristique. Il s’agit, en fait, de développer une intrigue, un récit intéressant, qui tient le lecteur en haleine, à travers des lieux qui jouent un rôle important dans le fil du récit. Mais, aussi, s’il veut aller plus loin, l’amener à réfléchir sur l’histoire de ces régions (par laquelle s’éclairent certains mécanismes du récit, certaines zones de l'intrigue), et, surtout de se pencher sur l’évolution de notre Europe, et des pièges qui lui sont tendus, avec la dégradation de son tissus économique et social et l’apparition de nouvelles formes de criminalité, l’émergence des nouvelles mafias et leur facilité à se couler dans les fragilités de nos sociétés.
   Avec « Le groupe », je prolonge l’évocation des métamorphoses des groupes d’extrême-gauche depuis l’après 68, idéalistes et plein d’espoir, jusqu’aux dérives d’aujourd’hui.
  Ainsi, tout en admirant les Camilleri, Montalban, Markaris, Khadra, par mes doubles racines méditerranéennes, entre Provence et mer Egée, je me sens également assez proche de Thierry Jonquet et de sa vision pessimiste de nos sociétés européennes.

lundi 28 avril 2014


Ecriture et musique


« Aussi loin que remontent mes souvenirs, les mots sont importants pour moi. Leur son, leur construction, leur racine..

Gil Scott-Heron, auteur-compositeur et interprète.
Prologue de « La dernière fête » (ses Mémoires inachevés)


Je me suis suffisamment expliqué, dans mes postfaces, sur la place qu'occupe la musique dans mon écriture, le rôle qu'elle joue.
Les citations qui accompagnent mes débuts de chapitre ou mes nouvelles montrent le caractère varié de mon univers musical. Certains diront plutôt : "hétéroclite". Ils n'ont pas tort.
J'écoute selon l'envie, ou le hasard. De la musique celtique au flamenco ou au tango de Piazzola. Mais je retourne régulièrement à mes valeurs sûres, Sixties, musique californienne des Beach Boys à Steve Miller, rock du "Deep south" des Allman Bros, 38 Special, Lynyrd Skynyrd, Govnt Mule, et aussi Brel, Ferré, Nino Ferrer, rébétiko et musique grecque, bossa nova et jazz…
En ce moment, j'oscille entre Steely Dan, Warren Haynes et Porcupine Tree.
Steely Dan pour le mélange jazz rock et la qualité d'une musique impeccablement ciselée. Warren Haynes, parce qu'on sent chez lui un plaisir à jouer de la bonne musique, la sienne et celle des autres. Et je viens de découvrir une extraordinaire version de "Pretzel Logic", dans son concert au Moody Theatre. Réussir une interprétation d'un morceau aussi emblématique de Becker et Fagen, voilà qui force le respect. Quant au groupe de Steve Wilson, je pense qu'on ne peut le réduire à n'être que le Pink Floyd des années 2000.
Mais je reviens souvent à CSN&Y, ensemble, ou individuellement, comme à Daho ou à Lavilliers, Bashung et Goldman, à Bebel Gilberto et Carmen Cuesta.
Après le succès des nouvelles associées aux chansons de Neil Young, notre recueil-hommage à Tamla Motown a pris son envol. Les lecteurs qui me découvrent à cette occasion saluent l'originalité de la démarche, cette fusion entre musique et littérature.
Et, actuellement, je réfléchis à ce point particulier : autour de quelle musique,  vais-je construire mon prochain livre ?
Je terminerai (temporairement) sur l'idée que l'arrière-plan musical nourrit largement le caractère onirique fondamental du polar.
Onirique ? Dans mon dernier polar publié,"Le groupe", j'ai composé un texte dans lequel, j'esquisse une approche de l'onirisme dans le roman et le film policiers, en même temps qu'une analyse des liens confus entre les ingrédients de l'intrigue policière et les métaphores du conte de fée.
Les réactions des premiers lecteurs, autant pour le roman lui-même que pour les pistes de réflexion que je propose dans la préface, me montrent qu'il est en train de rejoindre le succès de "Soleil de nuit".

lundi 17 mars 2014

Polar et conte de fée

« Le polar joue sur l'ambivalence puisqu'il crée des personnages de fiction dans des lieux réels. Il joue sur le désir et la réalité. »  
Jean-Claude Liaudet, psychanalyste
    
 


Lorsque le passionné de polars diversifie ses lectures, qu’il se risque à voyager à l’extérieur de l’hexagone, il découvre que le polar vit partout dans le monde et sous des formes originales, expression, chaque fois, d’une géographie, d’une culture, d’un mode de vie spécifiques.
A ce moment-là il peut prendre conscience de l’existence, à la périphérie de l’intrigue, de cet arrière-plan, le contexte social, la vie d’un pays, d’une région.
Je ne dis pas que tous les lecteurs opèrent systématiquement cette démarche. La plupart du temps, ils restent au niveau de l’intrigue, ils ne s’intéressent qu’au récit. Mais, inconsciemment, ils s’imprègnent de tout ce dans quoi le récit est empaqueté. Ils ne se rendent pas compte que leurs choix et le plaisir qu’ils éprouvent à lire un auteur plutôt qu’un autre sont induits par le style de l’auteur, mais aussi et surtout par l’univers original, le contexte particulier dans lequel il fait évoluer ses histoires.
Et souvent, à l’occasion d’une discussion, au cours d’une rencontre littéraire, je m’efforce peu à peu d’orienter les lecteurs vers cette prise de conscience.
Ils sont amenés, s’ils ne l’ont pas fait déjà, par eux-mêmes, à savourer plus nettement les contours, les différences, entre le polar scandinave, le polar espagnol, l’italien, le grec… et même des subtilités entre les romans suédois, norvégiens, danois et islandais.
Par ailleurs, cette toile de fond joue un autre rôle.
Si cet arrière-plan, ce « background » permet d’inscrire le récit de fiction dans la réalité d’une société, sicilienne, suédoise, islandaise ou grecque, il donne aussi ce parfum, ce climat particulier à travers lequel on peut goûter les nuances entre l’univers de Andrea Camilleri, celui de Henning Mankell, celui d’Arnaldur Indridason et celui de Petros Markaris.
Et, alors, découvrir des saveurs et des parfums distincts, bien spécifiques, comme ceux qui différencient les cuisines : paella, moussakas, pâtes aux fruits de mer, saumon et hareng fumés…
En fait, chaque romancier construit une atmosphère personnelle qui oriente le lecteur dans ses choix.
Cette atmosphère, je m’efforce de la créer en jouant sur mes voyages, mes séjours à travers l’Europe, ainsi que mes racines, un pied en Provence, un autre en mer Egée.
Intervient aussi le contexte musical sur lequel, on m’interroge de plus en plus souvent.
Au cinéma, le polar et le jazz, le polar et le rock, une alliance entre images et musiques, rien de bien original. L’irruption de l’art lyrique dans « Diva », ne servait qu’à brouiller les codes, à surprendre, comme les coups de théâtre déconcertent et séduisent dans une intrigue bien ficelée.
L’importance que j’accorde à la musique et aux images dans l'écriture de mes livres me permet de créer ainsi cette atmosphère particulière qui caractérise non seulement le polar mais aussi le film policier classique : l’atmosphère onirique.
Il suffit de se souvenir des films noirs des décennies précédentes, de revenir au « Deuxième souffle », au « Samouraï » et au « Cercle rouge », de Melville, au « Chinatown » de Polansky, ou, plus proches de nous, à « Usual suspects » et « Driver », avec, chaque fois, des personnages étranges dans un décor et des situations qui ne le sont pas moins.
Ce qui est paradoxal, c'est d'observer que ce qui caractérise ces scénarios, c'est aussi la vraisemblance rigoureuse et le réalisme précis, aussi bien dans la peinture des personnages et de leur environnement, que dans la construction des situations, alors que pour ces mêmes œuvres nous pouvons parler de glissement vers l'onirisme.
Prenons le film de Polansky. Une remarquable reconstitution historique, des personnages à la psychologie fouillée, et, comme un leitmotiv, cette obsession de Chinatown, quartier des secrets, du mystère et décor froid, indifférent où se joue la fatalité, alors que ce lieu, à peine suggéré par une succession de métaphores, n’apparaît vraiment qu’à la dernière scène.
Le héros ou l'héroïne, fonctionne alors, dans le livre ou sur l'écran, comme un personnage de contes de fée, franchissant des obstacles, déjouant des pièges dangereux ou s'efforçant de le faire, pour survivre. Mais se trouvant immanquablement métamorphosé ou profondément marqué par les épreuves.
Conte de fée et polar ? Association étrange ?
Pas vraiment. Et cela ne se réduit pas aux références superficielles comme pour le titre « Piège pour Cendrillon ».
Cela va bien au delà.
Et, là aussi, le lecteur devra se montrer perspicace.